Le moins qu’on puisse dire est que la saga et maintenant le film, ont remué les fantasmes enfouis. Le contenu du livre expose des pratiques de SM soft qui paraissent accessibles. Ces pratiques ne sont plus considérées comme stigmatisantes, mais deviennent envisageables. De nombreux lecteurs et lectrices  sont alors amenés à s’interroger sur leur désir et sur ce qu’est le SM (sado-masochisme).

Nous allons essayer de donner quelques éléments aux lecteurs qui s’interrogeraient sur ces pratiques SM, leur sexualité et les intrications psychiques. Nous essaierons aussi de donner quelques pistes pour ceux qui s’interrogeraient sur la façon dont on peut introduire ces pratiques dans la vie sexuelle de leur couple.

 

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I/ Pratiques SM

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A/ Définition

Il s’agit d’un type de pratiques sexuelles, dans lequel la relation comprend une part de douleur, d’humiliation, de contrainte, de domination ou de soumission. Les pratiques SM dans leur forme habituelle incluent systématiquement le consentement mutuel, et la définition d’un cadre précis dans lequel ces pratiques sont consenties. Ce cadre donne lieu à un contrat, dans lequel est aussi défini un « safeword » ou « mot d’alerte » qui, s’il est prononcé par la partenaire en position de soumission ou de douleur, met immédiatement et inconditionnellement fin à la pratique en cours. Cette conscience des choses présuppose que les partenaires soient majeurs et au clair sur leur sexualité.

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B/ Différents types de pratiques

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Les pratiques sont très diverses. En voici quelques exemples:

  1. Bondage: pratique consistant à lier le partenaire soumis avec des cordes, généralement en chanvre. Le but est d’obtenir l’immobilisation totale du partenaire soumis, le rendant parfaitement vulnérable. Beaucoup de techniques s’inspirent de techniques japonaises initialement dénommées kinbaku ou plus récemment shibari.
  2. Usage de la douleur: plusieurs pratiques sont en usage: utilisation de la cravache ou du fouet, suspension de poids à des parties du corps…
  3. Humiliation psychologique: il s’agit principalement de l’usage du contexte sans infliger de douleur physique. Il peut s’agir par exemple de forcer le partenaire soumis à se déshabiller en public, à rester immobile pour servir de mobilier etc…

Le SM fait également souvent appel à l’utilisation de sextoys. Maintenant, il faut se rappeler que dans le domaine du SM c’est principalement l’imagination des partenaires qui créera l’excitation sexuelle.

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II/ Est-ce normal d’avoir des fantasmes sadomasochistes ?

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La plupart du temps avoir des fantasmes sadomasochistes est parfaitement habituel. Beaucoup de gens ont ce type de fantasmes, même si ce n’est pas forcément un sujet facile à aborder, y compris dans le couple.

Lorsque les pratiques SM sont au service du couple, et qu’elles viennent renforcer une sexualité de qualité, cela ne pose aucun problème dans la mesure où il y a consentement mutuel et respect de la sécurité. Elles peuvent devenir un problème principalement lorsque l’un ou l’autre n’accède à la jouissance que par les pratiques SM, de façon exclusive.

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III/ Comment aborder ce sujet dans le couple?

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S’il est souhaitable de pouvoir aborder avec une franche sincérité les besoins, problèmes ou désirs dans le couple, le sujet de la sexualité reste un domaine risqué, de part les enjeux qu’il véhicule. Alors aborder la notion du SM… est tout à fait possible, mais doit se faire avec prudence.

Quelques conseils et principes qui peuvent aider:

  1. Pour les pratiquants occasionnels, le SM doit rester un bonus, qu’on utilise pour pimenter la vie sexuelle. Pas pour compenser une vie sexuelle insatisfaisante. Il semble donc préférable de faire part de ces fantasmes quand tout va bien au niveau de la vie sexuelle et de la vie de couple. Le risque est que sinon, le partenaire ait l’impression de « ne pas assurer » sur le plan sexuel et qu’il est être complété par des expédients.
  2. Il peut être utile d’en parler sur un plan général dans un premier temps, afin de connaître la position de l’autre. Est-il fermé? choqué? dégoûté? Inquiet? En fonction de la réaction du partenaire, il pourra être utile de l’aider à exprimer ce qui crée ce ressenti. Il sera aussi utile de savoir quelles représentations il a des pratiques SM.
  3. Dans un deuxième temps, celui qui a envie de pimenter la sexualité du couple par ces pratiques peut exprimer son envie en centrant bien les choses sur le désir qu’il aurait à tenter l’expérience du SM. A aucun moment, il ne doit utiliser la négociation, le chantage, ou la coercition: l’autre doit être en mesure de se faire une idée, sans être sous influence.
  4. Si le conjoint est dubitatif, le mieux est de lui laisser le temps de la réflexion sans chercher à insister ou à obtenir son accord à l’arraché. Un bon moyen consiste à se documenter ensemble, de parcourir des sites, de lire des articles, et d’échanger ses impressions, ses ressentis et ses préjugés.
  5. Le maître mot est la patience: si le partenaire refuse dans un premier temps, il est judicieux de respecter ce refus, sans aucunement lui faire subir de mesure de rétorsion ou de pression. Peut-être changera-t-il d’avis, ou pas… C’est son droit le plus strict, à respecter.

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IV/ SM et psychisme

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A/ Ce qui est mis en jeu lorsqu’on envisage des pratiques SM avec son partenaire

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  1. La première crainte est de passer pour pervers aux yeux du partenaire. Il est donc important de bien spécifier que vous souhaitez une recourir à ces pratiques pour compléter vos jeux sexuels mais pas en faire une exclusivité.
  2. La deuxième est la crainte que l’autre ne se croie plus assez  attirant à vos yeux. Il est donc très important de le rassurer à ce sujet, en insistant bien sur le fait que c’est justement parce que cela va bien entre vous pour aller plus loin, et non pas pour compenser quelque chose.
  3. Le SM reste bien souvent du fantasme, quand on le concrétise on peut avoir peur de perdre le côté attirant du fait de l’avoir accompli. Effectivement, le fait de concrétiser un fantasme fait que ce n’est plus un fantasme, par définition. Mais cela ne veut pas dire qu’il y a extinction du désir, sauf s’il existe des problèmes pré-existants.
  4. Il est important de comprendre qu’entre la représentation que l’on se fait de la pratique SM et sa réalisation concrète, il y a des différences énormes: la pratique dans le couple ne correspondra généralement pas exactement ni à la scène fantasmée, ni aux scènes des films pornographiques. Il est donc important que les attentes que l’on a autour de ces pratiques ne soient pas érigées comme objectif mais restent à leur place: de simples suggestions.
  5. Que l’on soit en position de soumis ou de dominant, il n’est pas forcément facile de tirer du plaisir de la situation. En effet, la sexualité est habituellement une activité très instinctive, très émotionnelle, alors que le SM est une pratique comprenant une grande part cérébrale. Il est donc parfois difficile de tirer le plaisir de ces pratiques SM, surtout au début. Le rôle du scénario, de la mise en scène, du contexte est essentiel.
  6. Le jeu SM impose une relation par essence asymétrique entre les deux partenaires. Il n’est pas forcément facile d’assumer les responsabilités psychiques qu’implique chaque rôle. Ainsi, le dominant, libre de ses actes, doit assumer le fait qu’il est responsable de la qualité de la séance et du plaisir qu’il fera éprouver à lui-même ainsi qu’au partenaire. Ce rôle nécessite suffisamment de confiance en soi, donc est à éviter si le contexte psychique ne s’y prête pas.
  7. Le jeu s’arrête dès la fin de la séance, il n’y a plus de dominant et le soumis n’est plus soumis. Il capital que les pratiquants soient suffisamment forts psychiquement pour bien cloisonner ce qui est du jeu SM et ce qui est de la vie de tous les jours. Ce qui est dit ou fait pendant le jeu SM ne doit jamais interférer sur le reste de la vie. De même rien de la vie extérieure ne doit inférer sur les jeux: on ne fait rien « payer » au soumis qui soit en rapport avec quelque chose d’extérieur au jeu SM.
  8. Il est important que les pratiquants soient tous suffisamment stables psychiquement et aient assez d’estime d’eux mêmes et de confiance en eux mêmes pour bien faire la part des choses entre la parenthèse de la pratique SM et le reste de leur vie psychique. Le SM n’est pas à pratiquer en cas de souffrance, d’anxiété importante, ou de dépression.
  9. Le jeu SM conduit en fait le dominé à surmonter, par son endurance, ce que lui fait endurer le dominant. Il y a donc en fait un triomphe récurrent du soumis qui arrive à supporter ce qui lui est infligé. Il est très important que le dominant soit conscient de cette réalité: la position de domination est une position de domination apparente. IL faut absolument que le dominant accepte l’idée qu’il « perdra » quasiment toujours face à l’endurance et la force de volonté du soumis. Il est donc essentiel qu’il soit bien clair que toute notion de triomphe ou de défaite est exclue: c’est un échange, pas une lutte, malgré les apparences.
  10. Le but rechercher doit être le plaisir des deux partenaires. Il n’y a rien à en attendre de plus. En particulier, le but ne doit jamais être de régler un problème personnel ou de se lancer des défis personnels.

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B/ Préjugés et SM

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  1. Les soumis sont en position de domination dans la vraie vie. C’est faux. C’est le cas… ou pas!
  2. Les gens qui pratiquent le SM sont forcément pervers. Ce n’est absolument pas le cas.
  3. Les dominants compensent souvent des insuffisances sur le plan sexuel: là encore c’est faux. Utilisées dans de bonnes conditions, ces pratiques servent à agrémenter la sexualité.

Les pratiques SM présupposent un grand respect mutuel, et un consentement libre et total des deux partenaires.

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V/ Précautions avant de se lancer dans des pratiques SM

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  1. Connaître parfaitement son partenaire dans une sexualité classique
  2. Avoir une confiance maximale dans son partenaire
  3. Poser un cadre précis avec un « safeword » ou  « mot d’alerte »
  4. Expliciter clairement les pratiques, positions ou gestes qu’on est prêt à accepter et ce que l’on refuse. Les limites de l’acceptable doivent être posées de façon indiscutable
  5. Jamais sous le coup de substances psychotropes (alcool, cannabis, cocaïne, crack, hallucinogènes ou autres drogues)
  6. Jamais quand l’un des deux pratiquants n’est pas au top psychiquement (pas si dépression, crise d’angoisse, ou autre)
  7. Le ligotage ou les autres jeux doivent toujours privilégier la sécurité des deux participants et doit être la première préoccupation. Rappelons que les pratiques SM présupposent un grand respect mutuel.